Les enfants de la paix

La première fois que je suis allé en URSS c’était encore un pays mystérieux et inquiétant. Personne ne connaissait de Russes à part les quelques anciens immigrés du temps de la révolution qu’on rencontrait parfois à la cantine du conservatoire Sergueï Rachmaninov sur les quais près du Trocadéro. J’étais alors journaliste à la rédaction des journaux et magazines de la Une, la première chaîne publique de France, et parfois travaillais avec les productions pour les USA que montait Edward Flaherty un expatrié californien que j’avais connu quand j’étais rentré de Los Angeles pour You Ask For It le show américain pour lequel on travaillait tous les deux.

Ce que me proposait Edward était de suivre une comédie musicale basée sur le livre Les Enfants de la Paix interprétée par des enfants russes et américains. L’opération monté par un producteur anglais faisait partie d’un des plans pour une détente avec l’ouest voulu par Corbatchev le nouveau chef du Kremlin. L’équipe de Tv était un pool constitué outre Edward qui comptait vendre le sujet à ABC, de Christian Jack un caméraman de CBS et un gros bonhomme plus âgé pour le Wal Street Journal. A l’époque un visa de tournage n’était délivré que sur invitation et une seule télévision et un seul journal papier par pays avaient droit à un correspondant qui de plus était assigné à résidence à Moscou. Avec les Enfants de la Paix nous allions faire une tournée dans toute la Russie avant de l’amener aux USA. En allant au culot voir le secrétaire général de la Une j’obtint une lettre de mission mais aucun engagement financier.

Nous étions logés à Moscou dans un hôtel géant et tout neuf réservé aux étrangers qui n’avit rien à voir avec la vie de Russes de ce temps-là. Des gamins de la place rouge qui étaient tous muets proposaient des dizaines de roubles pour un dollar alors que le change officiel était de deux dollar pour un rouble. C’était le début de la pérestroïka les étrangers étaient de bêtes curieuses dans un pays fermé au monde depuis soixante-dix ans. Nous furent invité à boire un verre chez l’architecte américain qui depuis dix ans habitait ici avec sa famille pour construire la nouvelle ambassade des Etats Unis. C’était un ami de Ronald Reagan qui appréciait les Russes et avait une vision différente des soviétiques que la peur paranoïaque qu’entretenait les médias américains. Il nous dit que si les Russes envahissaient New York ils se feraient voler les bottes le premier jouir;. C’était une société sous contrôle où une fille seule pouvait traverser Moscou en pleine nuit en toute sécurité.

La troupe de la comédie musicale comportant une soixantaine de jeunes artistes, chanteurs et danseurs de six à quatorze ans, filles et garçons, russes et américains. L’orchestre était celui de Stas Namin, un rockeur qui était le petit fils l’Anastase Mikoyan un des proche de Staline et sa compagne la chanteuse de la famille d’Andropov tous deux pas très bons mais très connus du public local. Nous étions avec des boyards du système et pratiquement intouchable. Un jour Stas nous amène à la campagne et les flics nous arrêtent car il faut un laisser passer pour quitter la ville. Je ne sait pas ce qu’il leur dit mais cela avait l’air violent et il nous laissent passer. Les datchas de la nomenclature censées être le comble du luxe sont décevantes et ont l’air de pavillons de campagne de la classe moyenne française. Un soir nous allons chez un vieil acteur célèbre qui a joué le rôle de Staline. On nous avit dit que son appartement dans l’immeuble en face de la loubianka était couvert était couvert d’or. Tout était usé et triste et les murs n’étaient pas complètement peints avec la même couleur. Il était temps pour l’URSS de sortir de l’isolation du paradis socialiste.

Nous faisons des représentations dans plusieurs villes dont certaines avaient toujours été interdites aux médias étrangers comme Ulianovsk la ville de Lénine. Nous tournons dans sa maison natale qui est petite mais propre et bien meublé comme un musée. Je demande au guide pourquoi toutes les maisons ne sont pas comme cela. Christian me fait signe de ne pas trop insister. Nous devions aller à Kiev quand on nous annonce qu’il y a eu un accident nucléaire à Tchernobyl. On annonce au enfants de la troupe qu’il ne devront plus manger de glaces à la crème car les pâturages seront surement impacter par les radiations. Après un long voyage en bus à travers la Crimée nous arrivons à Yalta et après la visit du palais d’été des Tzars et du fameux traité nous attend une surprise. C’est la fête annuelle de pionniers les scouts soviétiques dont les plus méritants ont ici leur plus beau camp de vacances au bord de la mer rouge. Un espèce de carnaval avec de miliers d’enfants qui marchent en bon ordre. Impressionnant.

Tout au long de notre voyage nous étions surveillé par nos traducteurs et des accompagnateurs à la mine sombre qui nous disait ce qu’il ne fallait pas filmer comme les aéroports et ponts considérés dans leur panaro comme des cibles stratégiques. Christian se faisait un plaisir de tourner discrètement sa camera vers tout ce qu’on voyait. Qand nous sommes revenus à Moscou nous avons fait une visite au bureau de CBS. Nous sommes reçu par la correspondante en place avec un grand sourire. Elle est inérèssée par les images que nous avons de Uliamovsk car mais quand on lui parle de nos images de ponts et d’aéroports elle nous montre un mur de cassettes. Ce n’était donc pas si secret. Le jour du départ le vent souffle sur l’aéroport enneigé ou nous allons embarquer notre charter pour Londres. Au passage de la douane je remarque que nos accompagnateurs si discret ont un passeport différent de celui des autres russes. Dans le hall d’embarquement une demie douzaines dofficiers du KGB reconnaissable dans leur uniforme aux bottes parfaitement cirées accompagnaient pour nous impressionner un représentant d’Ostankino la télévision russe. L’homme de la télévision qui demandait cinquante mille dollars pour l’exportation des cassettes que nous avions tourné. Les enfants et les accompagnateurs étaient montés à bord et l’équipe de tournage fumait des Malboro avec les hommes du KGB très aimables. Pour être crédible, Edward notre producteur négocie le prix pied à pied durant une heure pour finalement lui écrire un chèque bois de vingt mille dollars.